Portrait 19

Il promène ses ailes blanches au-dessus de la nuit. Il en perçoit toutes les nuances de sa vue exercée. Il en saisit les lumières qu'il fixe pour le plaisir de nos yeux. Grâce à lui, les amoureux se fichent de la pose, ils osent vivre, s'amusent à être eux-mêmes... libres. Il entraîne dans le courant ascendant de son vol léger les monuments les plus lourds de la ville comme les spirales spirituelles de notre art, l'aïkido... L'instantané s'immobilise sur le papier tandis que la vie continue au-delà des limites qu'il s'impose, tandis que le trait se prolonge sur le tatami blanc de la vie. Calligraphie. Ce n'est qu'un bref cliché, mais travaillé encore et encore, jusqu'à le rendre sensible à différents niveaux, lisible.

Son regard parcourt les lignes du monde et analyse en trois dimensions les tenants et les aboutissants qui font que la planète tient encore ou se délite sous nos yeux aveugles. Toujours prêt à engranger les nouvelles, à les trier, les classer dans ses albums photos, objets de son analyse au laser...

Loin de son labo, il peut devenir bavard, voire emphatique, souhaiter convaincre, mais il est aussi joueur, léger dans la relation comme un timide rayon de soleil de printemps... Il sait ce qu'il ne veut pas. Il sait ce qu'il veut. Connaît-il le plan de Dieu pour lui ? Dans ses voeux, il y a quelques années, le Dalaï lama soulignait que parfois, nous avions la chance de ne pas obtenir ce que nous voulions, car le plan divin se montrait infiniment plus généreux que nous-mêmes ne l'aurions été... envers nous-mêmes !... Il le disait avec d'autres mots, bien sûr...mais le fond m'avait marquée... J'ai coutume de penser que la volonté, plus qu'une marche vers un but, est un mur qui nous bloque et nous barre l'avenir... Peut-être ai-je tort ? Ou peut-être est-il important de s'adapter pour suivre une autre route que celle que nous avions prévue, même si elle nous fait peur...

23/05/11