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Mes contes, mes poèmes, mes calligraphies, mes dessins, mes peintures ( aquarelle, encre de Chine...), aïkido...

10 Oct

VOL DE REVE - Chapitre 10

Publié par Françoise Heyoan  - Catégories :  #Histoire policière

10

 

 

Lorsqu'un envoyé de Nenmoutef, le juge, se présenta pour la seconde fois chez elle, Méreret crut mourir. La première fois, on lui avait enlevé sa fille, Bérénice, Puis son fils, Harekheni, avait été retenu en lieu et place de sa sœur...Venait-on la chercher de nouveau ? Aurait-on découvert leurs activités, et... tout le reste ! Rien que d'y penser, Méreret sentit l'amertume opaque de la panique la gagner tout entière.

Le garde se présenta sur le seuil de la maison :

- Vous êtes autorisée à rendre visite à votre fils. Veuillez me suivre.

Méreret rassembla au plus vite quelques effets personnels de Harekheni, rafla quelques dattes séchées, des gâteaux qu'elle avait faits la veille et un gri-gri qui, elle en était sûre, protégerait son fils qui en avait bien besoin. Tout en s'activant, elle réfléchissait furieusement : s'agissait-il d'une vraie visite ? Pourrait-elle réellement voir son fils ? Ou était-ce un prétexte pour la garder à son tour et lui faire subir tout un questionnement ? Elle devait se préparer à cette éventualité. Divine Mout ! Comme elle regrettait de ne pas avoir proposé d'y réfléchir lors de la dernière réunion, où pourtant toutes ses compagnes avaient compati à son malheur ! Justement, elle ne pensait qu'à pleurer, alors. Comme elle s'en voulait maintenant, d'avoir été aussi imprévoyante !

Elle fut emmenée sans incident jusqu'à la cellule où son fils était retenu. Elle tomba dans ses bras, en pleurs. Il lui caressait machinalement les cheveux, mais son chagrin lui mettait une boule au ventre et dans la gorge. Il la rassura, comme elle savait si bien le faire pour lui quand il était petit. Enfin, il l'écarta et lui dit :

- Maman, nous avons peu de temps. Il faut me dire tout ce que tu sais.

A ces mots, Méreret sentit la panique revenir en elle, comme une panthère en feulant envahirait tout son être du souffle foncé du désespoir. Elle se secoua. Son fils n'avait rien de dangereux pour elle, au contraire ! Elle s'obligea à se calmer intérieurement et s'entendit lui demander :

- Si je peux t'aider, je le ferai. Mais je ne comprends pas pourquoi ta sœur a été emprisonnée, et toi ensuite, à sa place.

Harekheni fut surpris par cette réponse, mais il savait que sa mère lui cachait certaines choses. Il en est sûr depuis qu'il lui a annoncé le vol des offrandes et qu'il l'a vue presque tomber pour s'asseoir, tremblante et pâle comme la mort.

- Ils m'ont gardé parce que je leur ai appris que j'avais vu la voleuse.

Ces mots ont le même effet sur Méreret que la première fois où il lui a annoncé qu'il avait été témoin du vol. Il la porte littéralement vers un pouf non loin de là, et l'aide à s'asseoir sans chuter. Elle paraît prostrée un moment puis relève la tête :

- Comment peux-tu être si sûr de toi ? Tu as vu la personne s'enfuir avec les offrandes ?

- Non, pas exactement. Je n'ai aperçu que son profil, et encore, à peine... car il était à moitié caché par ses cheveux. C'était une femme. J'en suis sûr. Et elle dissimulait quelque chose dans son voile. J'en suis sûr aussi.

- Il ne t'est pas venu à l'idée qu'un homme pouvait se déguiser en femme pour mieux brouiller les pistes ?

Harekheni réfléchit un instant. Bien sûr, qu'il avait déjà songé mille fois à cette éventualité... Mais les formes soulignées par le voile étaient féminines, de même que le profil entrevu, il en aurait mis sa main de peintre à couper ... Il secoua tristement la tête :

- Je suis sûr que non...

Sa mère l'interrompit, soudain aux abois :

- Tu ne penses pas que le petit juge te retient parce qu'il te croit coupable ? Si tu dis avoir vu la voleuse, il peut très bien penser que tu avoues au minimum ta présence sur les lieux au moment du vol ! Sans autre témoin, tu deviens à ses yeux le suspect numéro un !

Et elle ajouta :

- Tu es sûr que ce n'est pas toi ?

Harekheni sentit la fourberie dans cette dernière question, et il en voulut soudain à sa mère, de se montrer si double ! Elle sait quelque chose et elle s'en défend en me posant cette question ! se dit-il, en colère. Il préféra se taire plutôt que de lui parler agressivement. Il la cloua cependant du regard.

- Pardonne-moi, mon fils ! Il ne faut pas m'en vouloir... C'est si dur, ces temps-ci, de voir mes deux enfants soupçonnés coup sur coup !

- Est-ce que tu sais pourquoi Bérénice a été arrêtée avant moi ?

- Comment voudrais-tu que je le sache ? Je t'ai déjà dit que je n'y comprenais rien...

Il la regarda d'un air de doute qui lui fit mal. Elle crut bon d'ajouter :

- Crois-moi, mon fils...

- Il n'empêche ! trancha-t-il. Je sais que j'ai vu une femme et le juge a arrêté ma sœur avant que j'en témoigne. Bérénice t'a-t-elle dit quelque chose que tu ne veux pas me dire par loyauté envers elle ?

Méreret soupira intérieurement. Il ne soupçonnait rien de la vérité ! Elle se sentit soudain presque joyeuse. Une sorte de rayon de soleil filtrait depuis son cœur. Harekheni perçut ce changement sans en comprendre le sens véritable :

- Maman ! Ce que j'essaie de te dire, c'est que Bérénice n'est peut-être pas encore à l'abri de tout soupçon... Si tu sais quelque chose, dis-le moi !

Méreret fut tentée de se confier à son fils. Le secret était si lourd à porter. Mais Bérénice n'était pas la coupable. Cela, elle en était sûre. Qui, alors ? Comment et pourquoi sa fille avait-elle éveillé les soupçons du juge ? Elle donnerait cher pour le savoir... Elle se souvint qu'ils étaient justement chez le petit juge, et que Nenmoutef avait une réputation de sévérité, voire de dangerosité, comme les hippopotames du Nil capables de renverser le plus stable des navires royaux. Elle choisit de se taire.

A l'affût de tous ces changements émotifs sur le visage de sa mère, Harekheni comprit qu'elle ne dirait rien.

Elle le regarda dans les yeux et lui désigna, par un regard circulaire, le lieu où ils se trouvait. Harekheni opina du chef. Ils s'étaient compris. Ils se serrèrent une dernière fois dans les bras l'un de l'autre et le jeune homme murmura à l'oreille de sa mère :

- Ne t'inquiète pas. Si Bérénice n'a rien fait, comme moi, nous ne sommes pas en danger. Notre bonne foi finira par éclater à la lumière de Râ.

C'est bien ce que redoutait Méreret...

 

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